Pen Hir, ce n’est pas tout à fait le Verdon, ni les Calanques. Mais l’escalade sur ce haut lieu de la grimpe bretonne est des plus enthousiasmantes et mérite largement le séjour.
Certes, avec un peu moins de 200 longueurs équipées et environ 60 mètres de hauteur, la falaise bretonne historique ne peut rivaliser par son ampleur ni par sa difficulté avec des spots de renommée mondiale du Sud de la France, par exemple. Toutefois, la beauté et l’originalité du cadre naturel, l’ambiance « gazeuse » de l’escalade accentuée par le ressac parfois violent des vagues, la qualité exceptionnelle du rocher et l’accessibilité du site en font un véritable petit paradis de la grimpe pour tous – surtout si l’on sait profiter des autres richesses naturelles, culturelles et sportives offertes par la presqu’île de Crozon.
Un phoque au relais
Sauf à user de substances illicites, quel grimpeur irait imaginer rencontrer un phoque à un relais ? C’est pourtant l’expérience vécue presque quotidiennement par les visiteurs de Pen Hir durant cette semaine de séjour. Un phoque gris de bonne taille – impressionnante pour les nouveaux venus que nous sommes – semble avoir élu domicile pour quelque temps au moins au pied de la paroi, à la confluence de courants garantissant une abondance de poissons.
Interrompant régulièrement son banquet comme pour observer les grimpeurs, il semble lui aussi trouver cette rencontre incongrue. Car rares sont les endroits du monde où elle est envisageable d’aussi près, presque nez à nez, entre deux univers si différents : outre certaines parois du Pays de Galles, d’Écosse voire quelques autres plus méconnues des grimpeurs, il n’y a que dans ce bout du monde breton de Pen Hir ! Et cet étonnant compagnon de relais moustachu et dodu vient en quelque sorte nous frapper d’une évidence : nous sommes ici dans son monde, et il nous appartient de nous y comporter en invités respectueux et responsables pour en préserver toute la richesse à long terme.
Esthétisme, qualité et variété de l’escalade
Outre son cadre naturel, Pen Hir se distingue par la qualité de ses lignes d’escalade : près de 200 voies y ont été équipées sur les diverses faces de ce mini-massif, sur des inclinaisons variant de la dalle au surplomb. Sur sa falaise principale, l’escalade est raide, voire gazeuse, sur un grès très dur et adhérent (sauf les jours de pluie) et criblé de prises et de fissures grâce au travail millénaire des embruns. C’est avant tout le royaume du 5 et du 6, et un plaisir du geste et des yeux pour ceux qui ne se focalisent pas exclusivement sur la performance.
Le pied de la falaise principale est accessible, selon le secteur, soit à pied (s’il est assez sûr) soit en un ou deux rappels (avec de bonnes terrasses de relais intermédiaires et un équipement irréprochable).
Les contreforts et parois secondaires, eux, proposent généralement des voies plus faciles en dalles ou petits ressauts de 10 à 40 m, idéales pour les débutants, les enfants et autres publics plus impressionnables en phase d’apprentissage et « d’acclimatation » au monde vertical. Elles sont en outre particulièrement faciles et rapides d’accès à pied.
Enfin, quelques itinéraires dans le même esprit que les voies de traversée ou d’arête des Calanques, voire de deep water solo (sous réserve de vérification) ont été tracés (ou restent à ouvrir) vers les « Trois Pointes » (la presqu’île qui fait face à la paroi principale) ou, plus loin, sur les « Tas de Pois » (les îlots immédiatement voisins, mais accessibles seulement par la mer).
Un mini-massif idéal pour l’apprentissage et l’escalade-plaisir
En tant que guide de haute montagne et moniteur d’escalade, j’estime que Pen Hir offre un terrain idéal de découverte, d’apprentissage et de perfectionnement pour toutes sortes de publics. Les petites parois d’initiation, immédiatement accessibles, permettent une approche très facile et « douce » de l’activité. La paroi principale et ses 60 mètres entrecoupés de confortables relais permettent, de façon très sécurisante, de commencer d’apprivoiser le vide et d’expérimenter les étapes et manœuvres clés de l’escalade en tête de cordée ou des grandes voies en terrain d’aventure : descente en rappel, équipement des relais, pose et récupération des coinceurs, communication en cordée…
Quant aux parcours les moins équipés de la grande face ou des Trois Pointes, ils permettent aux plus épris d’aventure de se prêter au jeu de la recherche – voire de l’ouverture – d’itinéraire.
Enfin, la beauté des lieux favorise une prise de conscience écologique – car sans ses oiseaux, sans ses fonds marins et sans son phoque, Pen Hir ne serait plus tout à fait Pen Hir…
Possibilité de combiner avec d’autres activités
Si l’escalade à Pen Hir vaut à coup sûr et à elle seule le déplacement, la presqu’île de Crozon permet aussi de la combiner avec toute une diversité d’activités outdoor ; selon la météo du moment et selon vos goûts, je vous conseille par exemple : du surf sur les plages de Goulien ou de La Palud voisines (des stages de tout format sont possibles, ainsi que des locations de planches); des activités nautiques (école de voile, location de kayak de mer, chars à voile, etc) et de la plongée sous-marine à partir de Morgat, par exemple; de l’équitation (plusieurs centres sur la presqu’île); ou encore du parapente – eh oui, aussi ! – en profitant des ascendances dynamiques à partir du Menez Hom, le point culminant de la Bretagne.
Quelques bons plans locaux
Loger :
Le camping de la presqu’île, au centre de Crozon, est franchement très bien comme camp de base : vert, fleuri, confortable et à deux pas des commerces et du marché quotidien. Réserver bien à l’avance en été.
Le camping de Goulien, lui, offre surtout l’avantage d’être en prise directe avec la principale plage sportive locale.
Quelques rares pentys (petites maisons traditionnelles en granite) disponibles à la location sur la presqu’île.
Se restaurer :
La crêperie La Frégate, au Faou, est réputée la meilleure de Bretagne et valoir le détour – et il faut réserver bien à l’avance en été…
Le port de pêche de Camaret-sur-Mer permet tous les jours d’acheter directement aux pêcheurs et producteurs et de consommer sur place des poissons et fruits de mer.
Enfin, le marché de producteurs locaux (tous les matins au centre de Crozon, place de l’Église) propose plein de bonnes choses…